vendredi 6 février 2009

Etat d'âme (passager)a

Les quelques lignes ci dessous lues dans un bouquin : Carcassonne Sa cité Sa couronne édité par B ARTHAUD justifie le petit texte que j'avais écrit voilà quelques années concernant un gosse dont les grands parents s'installèrent à la Cité début 20ème siècle, Espagnols qui quittèrent leur pays sans jamais y retourner . je laisse apprécier et je cite :

" La Cité est faite pour les conquêtes, c'est la Tradition, l'Histoire est un éternel recommencement, c'était sin histoir d'hier, c'est son histoire d'aujourd'hui.
Si on pénètre dans le dédale des rues étroites et tortueuses de la ville intérieure, le français est l'exception: sur 800 habitants , il y a 600 ouvriers Espagnols: la conquête est faite, c'est ainsi que les Wisigoths absorbèerent les Romains; tous les enfants qui piaillent, les femmes qui lavent, qui jacassent à la fontaine, tous sont espagnols, les Sarrazins sont revenus , voilà pour le peuple..."

Confessions intimes : Douce France Ô pays de mon enfance……..
Petit fils d’immigrés tant du côté paternel que maternel, ouvrier agricole et terrassier francisés, ils s’exprimaient dans un drôle de langage qui enfant me ravissait, : » je vais asaguer las florès « disait ma grand mère. Elle avait un véritable petit jardin dans une minuscule cour intérieure de cinq mètres carrés dans une maison à l’intérieur de notre Cité de Carcassonne. Il faut dire que la Cité fin du 19ème , début du 20ème siècle, n’était pas le supermarché touristique que nous connaissons aujourd’hui, c’était un petit village avec ses écoles (garçons d’un côté filles de l’autre) ses instituteurs, ses commerces , son Eglise , et je me demande si l’auteur d’Asterix le Gaulois ne s’est pas inspiré des personnages qui le peuplaient ?
Je suis devenu Français par la naissance et par l’école, pupille de la nation, orphelin de guerre, la République m’a pris sous ses ailes et j’ai été adopté par celle-ci. Comment ne pas être plus Français ? et pourtant les souvenirs de ma petite enfance sont d’une noirceur et d’une violence telles que je les ai enfermées dans un coffre secret inviolable : j’étais un sale Espagnol . Pour un gosse de 4 ou 5 ans se faire traiter de sale Espagnol était incompréhensible. Sale, je ne l’étais pas plus que les autres, espagnol c’était ma fierté. Les espagnols premiers partout disait mon père et effectivement chaque fin d’année à l’école des garçons de la Cité j’étais primé et allais recevoir le prix d’excellence des mains du Préfet, du Maire ou de l’Inspecteur d’Académie dans le grand théâtre où toutes les écoles étaient réunies. Le sale Espagnol avait sa revanche. Plus de cinquante ans après l’obsession de ma mère pour la moindre petite tache ou pour des souliers non cirés ressurgit dans ma mémoire, c’était donc pour me protéger que tous les jours ma mère faisait l’inspection de ma tenue vestimentaire. Interdit les matchs de rugby dans les lices avant les cours, les souliers devaient rester » neufs » le plus longtemps possible.
Adolescent, je fus emporté dans un grand tourbillon qui secoua toute la planète, l’Algérie, le Vietnam, les années 68, je n’étais plus un sale Espagnol, j’étais devenu progressivement un jeune Français comme il faut, cheveux longs, pantalons moulants délavés et pisseux, tee-shirt pas très ragoûtant, mal rasé, j’étais moins propre et je n’étais plus le sale Espagnol ! Cependant je n’avais pas le sentiment d’être un vrai Français, un Français à part entière, je participais à ce mouvement général, global, mais je me sentais différent, ailleurs, sentiment de vanité me direz vous ? Peut être ? je participais politiquement ainsi à de nombreux combats et aventures, avant les années 68, premier « seatting » dans la rue de la gare, face à la mairie, après avoir délibéré au premier étage du « Conti » nous voulions alors un conseil municipal de jeunes. C’était le temps où il pleuvait dans la maison de Daniel Gérard ou un autre entendait siffler le train, où l’on apprenait que c’était Charlemagne qui avait inventé l’école, où Biche ô ma Biche avait des yeux comme des papillons bleus, où tous les garçons et les filles de mon âge avaient les yeux dans les yeux et la main dans la main, cela allait très vite changer, les pantalons pattes d’éléphants, les chemises fleuries, les tuniques bariolées, les tee-shirt au dessus du nombril, l’époque hyppie était là et même notre Jojo national grand rocker devant l’éternel se mit au goût du jour. Faites l’amour, pas la guerre ! Aimez vous les uns les autres et c’est ce que nous avons fait au premier degré, I can’t get no satisfaction ! hurlait Mike Jagger ; quelques années plus tard, ce n’était plus le cas, à cœur vaillant rien d’impossible, sabre au clair , chargez si je peux me permettre ! Empêtré, englué dans une torpeur tropicale le réveil fut d’autant plus difficile, nous avions perdu tout sens des responsabilités. Après avoir laisser entrer le soleil « let the sun shine », les fleurs, les petits oiseaux, de gros nuages noirs firent leur apparition et la pluie s’abattit sur nos têtes . Il me revient en mémoire un petit refrain d’une chanson chantée en patois (pardon en occitan) qui disait : » un espagnol d’Espagne quand il pleut, il se mouille, mais un français de m…. quand il pleut il s’emmerde « je pense souvent à ce refrain : fatalité, attente de jours meilleurs….. dix ans plus tard nous voulions toujours changer la vie, 20 ans plus tard nous étions complètement transformés, robotisés, domestiqués , « technicolisés », il est bien loin le temps ! sous les pavés la plage, il est interdit d’interdire, à présent il pleut des cordes, il pleut, taisons nous , le soleil se lèvera toujours à l’Est et le grand balancier de la vie toujours oscillera.
Anton de Ciutad

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