samedi 7 novembre 2015

le cassoulet le millas et la lutte des classes


Folklore Audois.
Des réflexions faites en 1950 qui donnent une saveur particulière à ce plat devenu mythique dans le Lauragais en général et  l'Aude en particulier.



"""Est-ce à dire que la cuisine languedocienne a perdu tous ses caractères régionaux ? certes pas. Elle conserve des traits particuliers (le goût de l'ail - évidemment - et des épices). Mais les plats dits « locaux » n'intéressent plus guère l'ethnographe, parce qu'ils sont entrés dans le circuit commercial, touristique et somme toute «bourgeois». Le cassoulet de Castelnaudary, sur lequel on a écrit toute une littérature, en Lauragais et en pays d'Oc. est maintenant connu dans toute la France on le trouve jusque dans les bonnes auberges de Normandie. C'était. à l'origine. un plat populaire, un ragoût de haricots blancs que l'on mettait à cuire dans un pot de terre rouge - dit « Toupin" fabriqué à Castelnaudary ou à Issel. On y mêlait des couennes fraîches. un jarret de porc frais, du salé d'oie. du saucisson. Le four était chauffé avec des ajoncs épineux (agadeuses) de la Montagne-Noire qui passaient pour communiquer leur arôme au cassoulet. Ce mets, dont nous ne savons plus qui a répandu la légende qu'il aurait été apporté dans le Midi par les Sarrasins, en 719, sous forme d'un ragoût de mouton aux fèves blanches - associe en réalité les deux aliments auxquels la géographie avait d'abord voué les Languedociens de la Montagne-Basse : les haricots et le porc (et même pour renforcer le rapport géographique. il implique la présence de la poterie de, Castelnaudary. et des ajoncs de la Montagne-Noire). Le cassoulet était donc l'expression complète du Lauragais. Il est maintenant devenu un « plat bourgeois », le peuple lui préférant la viande de boucherie. C'est là un phénomène général qui ne manquera pas d'intéresser le Folkloriste : Les mets « grossiers » dont le peuple s'est, si l'on peut dire, libéré, continuent à passer pour « friandises » dans la Bourgeoisie. On se met, à la ville, à vanter les petits pains de seigle, le millas, selon un schématisme dont le « Folklore du millas» nous fournira un exemple bien caractéristique:"""



""Un jour que Henri IV s'était arrêté à Castres, les consuls lui demandèrent respectueusement de bien vouloir réduire les impôts qui étaient trop lourds. Le monarque s'étant enquis de ce que mangeaient les gens du peuple et ayant voulu goûter au « millas », les consuls lui en firent préparer une corbeille. Mais on avait employé une si bonne huile que cette bouillie ressemblait à un beignet. « Ce sont là des gâteaux ! » dit le Roi. (Et il refusa d'accéder à la prière des consuls). La légende ajoute que lorsque le Roi repassa dans sa bonne ville, les consuls, cette fois, lui firent servir une pièce froide de bouillie de maïs - le vrai millas - et que le roi, l'ayant trouvée exécrable, consentit enfin à alléger les impôts...


 De même, à Carcassonne (Cité) on raconte que la Duchesse d'Orléans (?) s'étant rendue chez une Madame de Gastine, notable de la Cité, aurait mangé chez elle du millas saupoudré de sucre. La Duchesse se déclara enchantée. Mais le lendemain, les bonnes gens criaient sur son passage : la Duchesse n'a pas goûté le millas roturier !... Tout cela signifie que le millas, les petits pains de seigle, les laitages paysans (les fromatjous) et le ragoût de haricots, sont passés de la table du pauvre bougre à celle du Bourgeois, en s'y perfectionnant. Bien préparés, ce sont, en effet, d'excellentes choses. Mais le peuple a connu, jadis, ces aliments sous leur forme roturière; et il en est dégoûté pour longtemps. Lorsqu'il reviendra au millas, par exemple, ce sera la preuve qu'il aura définitivement oublié, que pendant 200 ans, il lui tint lieu de pain; ce sera le signe, qu'en ce qui concerne l'alimentation, le nivellement qui s'accomplit tous les jours, aura atteint sa phase définitive : Au moins en ce domaine, il n'y aura plus qu'une seule classe, celle des consommateurs « égaux »."""


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