mardi 26 septembre 2023

utilisation des voies Romaines


 

L’utilisation « administrative » des voies : légions et courrier impérial

  • Le déplacement des légions : l’une des raisons qui ont poussé la République puis l’Empire à construire des viae publicae est le déplacement des légions ; sur un aussi vaste empire, les armées doivent pouvoir se déplacer le plus rapidement rapide, or, une légion en marche comporte 5000 légionnaires sans compter les valets d’armes, les mules, les chevaux et les chariots tractés par des bœufs le tout étendu sur parfois plus de 10 km. La vitesse de déplacement d’une légion au complet oscille entre trois et quatre km/h, pas plus. Les marches forcées peuvent être plus rapide mais dans ces conditions, l’impedimenta, le train logistique, ne suit plus. L’intérêt principal des voies publiques lorsqu’elles sont correctement entretenues est de permettre une avancée « normale » des légions notamment sans flaques boueuses provoquant des ornières fatales aux lourds chariots, inconvénient problématique sur des chemins classiques pendant les périodes pluvieuses.

  • À partir d’Auguste (63 a.C. à 14 p.C.), un « service des postes de l’administration impériale » voit le jour sur les plus importantes voies publiques, le cursus publicus : ses courriers, appelés tabellarii ou speculatores, parcourent en moyenne 75 km par jour en profitant du système de relais pour changer de monture. Exceptionnellement, ces courriers peuvent parcourir des distances plus importantes comme en 69 p.C. un courrier qui franchit les 108 milles romains séparant Cologne de Mayence en 12 heures à peine ce qui donne une moyenne de 13,5 km/h.

Gratuit, ce service fut utilisé très largement aussi par les dignitaires romains. Pour l’utiliser il fallait avoir une evectio ou diploma (lettre de transport). ou bien encore tractoria, donné par l’empereur en personne ou par le préfet de prétoire (consul qui commandant l'armée) ou bien encore par un gouverneur de province. Ces pièces déterminaient aussi ce que les voyageurs pouvaient prélever dans les magasins. Ces documents étaient limitatifs dans le temps. 

  • Les voies romaines disposaient de leur police de la route : le plus souvent, ce sont des bénéficiaires c’est-à-dire des légionnaires (1 solde ½ ou double solde et exemptés de corvées) qui sont détachés de la légion sur des points de passage stratégiques ou sur des stations routières importantes. Cette situation est quasi systématique en Germanie ou dans des régions proches du Limes où sont positionnées presque toutes les légions. Pour le reste du territoire de l’Empire ce sont probablement des soldats auxiliaires ou des gardes locales qui dépendent d’un préfet à la répression du banditisme.





Les commerçants et les voyageurs

Si de nombreux commerçants fréquentent les voies terrestres, pour de longs trajets, la plupart des marchandises prenaient, chaque fois que cela était possible, la voie fluviale, plus pratique et moins chère. On apprend par l’édit de Dioclétien que le transport fluvial était entre 5 et 10 fois moins cher que le transport terrestre et que le transport maritime était, lui, de 25 à 50 fois moins cher.

Une exception notable et amusante : Pline l’Ancien dans son Histoire Naturelle (X, 22, 53) nous apprend que des troupeaux d’oies font « à patte » le voyage depuis le pays des Morins (actuel Pas-de-Calais) jusqu’aux marchés de Rome.

L’insécurité régnant à certaines époques et sur certaines routes (troupes de Brigands) explique aussi la préférence du transport fluvial plus sûr.

Quant aux voyageurs, pèlerins ou touristes, ils préfèrent dès que possible voyager en groupe afin de pouvoir se défendre mutuellement en cas d’attaque de voleurs. Les voyageurs les plus riches n’hésitent pas à se déplacer avec leurs esclaves voire parfois avec d’anciens gladiateurs recrutés comme gardes du corps.

Les véhicules

Les romains utilisaient plusieurs types de véhicules hippomobiles à deux ou quatre roues, tractés par des chevaux, des ânes, des mulets ou par des bœufs pour les chariots les plus lourds.
La terminologie des différents types de véhicules est assez confuse tant les noms recouvrent des réalités proches. On peut citer en vrac les rhedae, carpenta birotae, caruca, clabulae, petoritum, cisium, essedum, plaustrum, benna, carpentum, carri…

Cependant, on peut distinguer les principales catégories :

– les véhicules de transport de personnes à deux ou quatre roues tels les rhedae ou caruca.




Reproduction d’une caruca – musée de Cologne)

– Enfin, il existait un type de véhicule particulier, peu rapide mais singulièrement confortable : la lectica ou litière qui était l’apanage des plus riches…


reproduction d'une lectica

reproduction d’une lectica – musée des temps barbares à Marle (Aisne)




Les aléas de la circulation

La circulation sur les voies romaines est exclusivement diurne, dans ces conditions, il est difficile de dépasser une moyenne de 20 milles romains/jour soit (35 km). Si les conditions sont exceptionnellement favorables, on peut parcourir une distance plus longue, mais le plus souvent, les conditions météorologiques, les incidents ou accidents peuvent ralentir considérablement la moyenne.

  • Les intempéries et l’état des routes : pluies, inondations, neige, ont des conséquences sur les infrastructures des voies et donc un retentissement réel sur la durée du voyage. Une crue soudaine et un passage à gué devient impossible obligeant les voyageurs à se détourner vers le 1er pont quelquefois fort éloigné. Des pluies torrentielles peuvent entraîner des glissements de terrains et couper les communications, idem avec la neige.

  • Finalement, ce sont les mêmes problèmes que de nos jours mais avec des moyens pour les résoudre bien moindre et moins d’incidences médiatiques.

  • Les accidents : Certes, la vitesse très faible limite les risques mais une roue brisée, un cheval blessé ou un voyageur avec une belle entorse de la cheville sur une voie peu fréquentée en toute fin d’après-midi et c’est une nuit à la belle étoile qui peut s’avérer problématique l’hiver par grand froid ou avec des brigands traînant dans les parages.

  • Les actes de brigandages : les voies romaines n’ont jamais été réputées pour leur sûreté. Nombreux sont les brigands de grands chemins qui sèment la terreur dans certaines régions. Si, comme le souligne Juvénal dans ses satires : « le voyageur dont la poche est vide chantera au nez des voleurs », les lettres de change n’existant pas encore, certains commerçants se déplaçaient avec des sommes parfois importantes pour leurs frais de déplacement ou pour leurs affaires. L’une des conséquences de cette insécurité : les voyageurs à cheval circulaient sur la partie gauche de la voie afin de pouvoir dégainer leur glaive et combattre plus facilement un ennemi potentiel arrivant en face (les britanniques ont gardé ce sens de circulation « romain » tandis que sous l’impulsion de Napoléon, l’Europe adoptait la circulation à droite).


Conclusion

Rome a conquis un vaste empire par les armes et par la diplomatie et elle l’a conservé par ce qu’elle a pu apporter de « mieux » aux populations indigènes. Si une certaine élite sociale a profité des bienfaits du confort à la romaine (domus avec hypocauste = système de chauffage, thermes publics, aqueducs amenant l’eau courante…) les voies romaines furent au bénéfice de tous.

Cependant, le rôle essentiel aux yeux du pouvoir de ce réseau est d’acheminer vers Rome le plus rapidement possible des nouvelles fraîches des quatre coins de l’Empire grâce au cursus publicus et aux relais fréquents sur les voies publiques.

Enfin, il convient de signaler que les voies romaines ont longtemps survécu à l’Empire puisqu’elles ont servi de réseau routier principal bien au-delà de la période médiévale.

De nos jours, ces voies, quand elles ont subsisté, ne sont que des vestiges servant aux promeneurs ou, exceptionnellement aux coureurs cyclistes du Paris Roubaix qui connaissent chaque année l’enfer des pavés (romains) du nord lorsqu’ils franchissent, trépides, la trouée d’Aremberg ou le carrefour de l’arbre.




Sources :



Un grand merci à JP Oppinger qui pour le blog "los Ciutadins" a réalisé cette série d'articles très instructifs sur cette periode Gallo Romaine










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